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ConformitéFinance Fiscalité et comptabilitéESG04 juillet, 2022

Passer au vert et en faire état : un guide étape par étape du pilier 3 sur la divulgation des risques ESG

Les autorités de surveillance financière se penchent désormais sur les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). L’Autorité Bancaire Européenne (ABE) contribue à cet effort en publiant des normes techniques de divulgation à l’attention des institutions de l’Union européenne au titre du pilier 3. Avec la présentation du premier rapport complet établi à partir de données qu’elles sont déjà supposées recueillir prévue pour Mars 2023 les sociétés ont peu de temps pour préparer leurs effectifs et leurs processus aux nouvelles exigences.

Nous offrons ici une approche en cinq étapes pour aider les sociétés à s’engager sur la bonne voie. C’est tout du moins notre intention, mais étant donné qu’une si grande partie du cadre de l’ABE est encore très vague (les règles et les procédures finales n’ont toujours pas été établies et des changements importants restent possibles) tout ce que nous proposons peut être modifié. Cependant, l’ABE est bien consciente des difficultés que cela présente pour les banques et leur laisse donc une large liberté de manœuvre.

Alors que les autorités consolident les procédures que les banques doivent observer, il est important de maintenir la fluidité des opérations. Une approche sensée ici est de se fier à l’esprit du cadre de base plutôt que de suivre les instructions au pied de la lettre. Les banques n’auront certainement pas réellement le choix puisque le texte continuera à évoluer, mais cela devrait leur permettre de garder l’esprit aussi ouvert que possible qui leur permettra d’aborder ce sujet relativement nouveau. Cette démarche devrait garantir votre conformité et assurer que vos prêts et vos activités sont en accord avec vos objectifs financiers et éthiques aux regards des critères ESG. Par conséquent, respecter ces étapes devrait vous aider non seulement à vous préparer à l’introduction de la divulgation des risques ESG, mais aussi à l’inclusion des facteurs liés aux ESG dans la conception générale de vos procédures et de vos portefeuilles.

Étape 1 : Définissez une stratégie ESG et l’appétence au risque.

Une banque devra déterminer dans quelle mesure elle a l’intention d’être verte tout en respectant ses pratiques de prêt et d’investissement ainsi que sa réputation. Sera-t-elle à forte intensité de carbone, neutre en carbone ou quelque part entre les deux ? Quelle que soit sa décision, elle devra probablement prendre des mesures pour aligner ses politiques, ses pratiques et son portefeuille sur sa philosophie. Ce qui signifie réduire ses investissements dans certains secteurs pour les augmenter dans d’autres. Cette démarche affectera probablement le profil de risques de la banque. Une plus grande exposition aux énergies fossiles ainsi qu’à d’autres secteurs moins écologiques constituera des propositions plus risquées, mais avec de plus grands rendements. Inversement, tendre à être plus vert pourrait signifier des risques ESG moins importants et des rendements plus faibles.

La prudence est de mise cependant, en effet il est possible de se perdre sur la voie de la sécurité et de se retrouver dans une zone dangereuse. Si une banque relâche trop ses normes de prêt pour mettre indiscutablement l’accent sur les débiteurs plus favorables aux ESG, tels que les fournisseurs d’énergie renouvelable, son risque de crédit peut augmenter et une exposition à une niche si retreinte peut créer un risque de concentration. C’est tout particulièrement vrai dans le cas où de nombreuses banques ont la même idée. Cela porte même un nom : l’effet de bulle verte. Un monde qui tourne grâce aux rayons de soleil et aux fortes brises semble idéal, mais offrir une quantité anormalement élevée de crédits pour le réaliser pourrait ne pas l’être.

Une fois que vous avez défini votre stratégie, évalué vos risques et défini les paramètres de vos risques, vous avez besoin de mettre cette stratégie en place. Définissez une poignée de points d’intérêt clé (vos objectifs ESG à appliquer au niveau des opérations et des processus) et évaluez-les à l’aide du Ratio d’actifs verts (GAR) et du Ratio d’alignement avec la taxinomie (BTAR), qui mesure le degré de conformité des activités d’une banque respectivement aux normes vertes et aux objectifs climatiques de l’UE, en tant qu’unités de mesure de votre portefeuille.

Étape 2. Concentrez-vous sur le processus, et non pas sur le rapport.

Dirigez vos processus et vos investissements de manière à ce qu’ils soient conformes à vos points d’intérêt clé. Gardez un œil sur vos mesures GAR/BTAR au fil du temps pour voir vos progrès de votre point de départ vers vos objectifs majeurs, telle que la réduction des émissions de carbone de 50 % d’ici 2030 adoptée par l’Accord de Paris de 2015. Des évaluations continues vous indiqueront le nombre d’ajustements encore à effectuer pour atteindre votre intensité carbone, financer vos émissions et vos autres objectifs, ainsi que les leviers à actionner pour atteindre vos cibles et vous remettre sur la bonne voie, si vous vous en êtes écarté. Vous aurez alors besoin de transformer vos analyses en actions concrètes, telles que changer vos processus d’octroi de prêt.

Étape 3. Préparez-vous au changement.

Le seul aspect de la divulgation qui reste inchangé est le fait que les règles et les procédures peuvent changer jusqu’à la dernière minute avant l’échéance de la première soumission, et probablement encore après. Les objectifs au sens large du cadre peuvent être ajustés. Même s’ils ne le sont pas, leurs responsables gouvernementaux et les autres intervenants peuvent réclamer des détails supplémentaires ou différents des banques, forçant ainsi les mesures et les relevés à être ajustés avec précision. De nouveaux scénarios devront être pris en compte et les modèles nécessiteront une mise à jour. Il est possible de devoir attendre jusqu’à cinq ans avant que les réglementations et les méthodes convergent et qu’une série de procédures cohérente soit mise en place. Face à une telle incertitude, ne consacrez pas trop de temps, d’argent, ni de confiance à un seul fournisseur, une seule méthode, ni une seule solution technologique. Assurez-vous que tout fournisseur ou solution auquel vous avez recours est suffisamment flexible pour s’adapter aux changements de réglementation et à ceux engendrés par l’évolution de votre entreprise.

Étape 4. Vérifiez vos attentes et votre feuille de route.

Bien qu’un grand nombre de détails du régime de divulgation reste encore à fixer, les attentes relatives à la livraison des données et des rapports en fonction du calendrier sont claires. Jusqu’à la fin de l’année 2023, les banques seront tenues de recueillir des informations qualitatives et devront être capables de quantifier une variété d’expositions d’actifs :

  • Activités éligibles ou non selon la taxinomie
  • Produits dérivés
  • Gouvernements centraux et banques centrales
  • Entreprises non soumises à la Déclaration de Performance Extra-Financière (DPEF), une loi de l’UE qui exige de certaines grandes entreprises de publier des informations sur leurs impacts ESG
  • Portefeuille boursier
  • Marché interbancaire sur demande

Vos données et vos procédures devront être affinées et finalisées au cours des deux années suivantes. Vous devrez alors développer des méthodes pour recueillir ces informations sur les émissions, les expositions durables du point de vue de l’environnement, les mesures relatives au risque physique, etc. pour remplir le modèle du rapport de divulgation, et il vous faudra également suffisamment de temps pour les mettre en œuvre et tester de nouveaux processus. Vous pourrez vérifier votre approche avec vos autres banques ou fournisseurs, ou faire vérifier votre travail par un tiers. Profitez de cette période pour réunir des informations, mettre vos capacités de collecte de données en place et rectifier vos processus d’allocation.

Étape 5. Travaillez avec ce que vous avez déjà, envisagez les changements importants plus tard.

Quelle que soit la voie que vous avez choisie pour votre institution, ne la suivez pas aveuglément sans vérifier régulièrement votre carte et votre boussole chemin faisant. Profitez de l’occasion pour apprendre et ajuster votre processus, non seulement à la date de la première soumission, mais également après, étant donné que des changements se produiront dans la manière dont vous faites les choses, et dans ce qu’on exige de vous. En ce qui concerne les modèles de risque, en particulier, il est probablement préférable d’expérimenter avec ce dont vous disposez actuellement ; il n’est pas nécessaire de réinventer la roue si la route sur laquelle vous voyagez et la destination changent tout le temps. Attendez que les réglementations soient suffisamment cohérentes pour avoir davantage de certitude quant à l’endroit où vous vous trouvez et ce qu’il vous faudra faire ensuite. Entre-temps, lorsque vous vous lancez des projets de back-office, prenez toujours en compte les rapports ESG dans vos processus. Examinez en continu votre position et votre destination, et considérez si les pratiques de certaines activités sont suffisamment avancées pour être incorporées dans votre philosophie stratégique à long terme.

Beaucoup d’éléments nouveaux, mais également beaucoup de points déjà bien connus des banquiers

Évaluer et divulguer les risques ESG est une entreprise nouvelle pour les instituts financiers dont les détails doivent encore être définis. La procédure comprend cependant des éléments qui vous sembleront familiers. Bien sûr certains d’entre eux constitueront des défis, mais ils pourront malgré tout se révéler être des occasions à saisir avec une approche visionnaire et un esprit ouvert pour tirer le maximum de ce que l’on sait déjà aujourd’hui tout en se préparant autant que possible pour un lendemain qui pourrait bien être encore plus difficile à prédire qu’il l’était hier.

Un des défis émergeant du cadre de divulgation, et du régime du développement des risques ESG d’une manière générale, dont les banques ont l’habitude est le besoin d’évaluer et de divulguer un risque composé d’une variété d’autres risques (liquidités, crédits, contreparties, concentration, et peut-être même plus) tous liés les uns aux autres. Ce contexte (les ESG et le changement climatique) est certes nouveau, mais pas le processus fondamental.

Un autre point qui n’est pas nouveau ici est la nécessité de déterminer votre exposition potentielle à cette série de risques interconnectés à des fins allant au-delà de la conformité et du signalement. La décision d’accorder un prêt spécifique, et à quel prix, sur la base d’estimations des risques pouvant comprendre plusieurs facteurs circonstanciels difficiles à évaluer constitue le travail quotidien des banques. Il en est de même pour la réunion de ces nombreuses décisions individuelles ainsi que d’autres intrants et analyses sous la forme de prévisions et de plans stratégiques devant les guider vers l’avenir.

La solution qui permettra aux instituts de venir à bout des complexités, des incertitudes et des changements continus du risque ESG sera déjà bien connue des banquiers qui ont eu à maîtriser au cours de la dernière décennie des cadres de supervision similaires du point de vue thématique et analytique : une architecture de gestion entièrement intégrée des données concernant toutes les fonctions majeures d’un institut. Alors que vous faites vos débuts sur la voie de la conformité aux nouvelles obligations de divulgation de l’ABE, la flexibilité, la capacité d’adaptation et la compréhension d’une telle solution vous permettront de traiter et d’utiliser ces informations dans des objectifs commerciaux stratégiques également, tant que vous restez ouverts aux nouvelles possibilités offertes par ce cadre, et que vous ne vous en tenez pas seulement à ces nouvelles nécessités.

Frederik Roeland
Director and Global Product Manager, Finance, Wolters Kluwer FRR
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