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Fiscalité et comptabilité 22 février, 2021

La déclaration TVA périodique : le début de la fin d'ici 2025 ?

La déclaration périodique de TVA, telle que nous la connaissons aujourd'hui, n'a connu que peu ou pas de changements au cours des 25 dernières années. Les changements résultant de l'introduction du « paquet TVA » en 2010 constituent une exception. Les questions que nous sommes en droit de nous poser sont les suivantes : « la déclaration TVA n'a-t-elle pas besoin d'un lifting en profondeur ? » ou, plus largement, « la méthode actuelle de déclaration de la TVA n'est-elle pas devenue obsolète ? »

Déclaration TVA et autres relevés

La déclaration TVA et les relevés liés, plus précisément le relevé de ventes intracommunautaires et le listing annuel des ventes, sont une source d'information pour l'administration de la TVA. Ces informations sont utilisées pour vérifier l'exactitude de la taxe payée et ainsi limiter la perte de recettes pour l'État. L'administration de la TVA ne laisse en effet pas cette source d'information de côté. Au contraire, elle utilise ces renseignements pour effectuer des contrôles ciblés. Après tout, la plupart des audits TVA annoncés aujourd'hui sont le résultat de contrôles logiques (data mining) auxquels les déclarations TVA et les autres rapports afférents sont soumis par l'administration. Il s'agit d'un processus technologique qui nécessite peu d'intervention humaine et permet de détecter plus rapidement les anomalies, y compris les fraudes.

La méthode actuelle de déclaration de la TVA n'est pas entièrement exempte de fraude. Bien que des contrôles plus ajustés soient réalisés et que les anomalies soient découvertes plus rapidement, le système d'exploration des données s’appuie sur des « transactions historiques » et l'administration de la TVA reste donc en retrait des faits. Après tout, la déclaration de la taxe n'est rien d'autre qu'une déclaration consolidée de transactions qui ont eu lieu dans un passé « récent ». Une anomalie, repérée maintenant par le système d'exploration de données, s'est donc produite dans le passé (il y a des mois ou même des années). Des parties malveillantes pourraient potentiellement exploiter cette anomalie, ce qui entraînerait une perte de recettes fiscales pour l'État. Dans une étude de la Commission européenne, la perte de TVA (également appelée « écart de TVA ») en Belgique est estimée pour 2018 à 10,4% des recettes attendues.

La perte de recettes TVA et la sensibilité du système à la fraude ne peuvent être résolues en ne faisant qu’un lifting à la déclaration de TVA, comme, par exemple en l'étoffant de grilles de déclaration supplémentaires. Même dans ce cas, l'administration de la TVA continuerait à être en retard sur les faits dans une certaine mesure et le système d'exploration des données resterait limité à la détection des anomalies historiques. L'administration de la TVA devrait peut-être envisager de modifier le système actuel en le transformant en un système de déclaration en temps réel. Il s'agit, bien sûr, d'une mesure assez radicale, mais certainement pas insurmontable.

Déclaration en temps réel

Un système de déclaration en temps réel signifie que la documentation pertinente est partagée avec les autorités TVA au moment même où elle est produite. En Espagne, par exemple, certaines catégories de contribuables sont déjà obligées de déclarer leurs opérations en temps réel (rapports dits SAF-T, basés sur les principes de l'OCDE). En contrepartie, ces assujettis bénéficient de certains avantages, tels que des reports supplémentaires dans la présentation de leurs déclarations de TVA périodiques et la suppression de certaines obligations de déclaration TVA. L'administration fiscale espagnole a ainsi l’occasion de réagir plus rapidement, de détecter et combattre beaucoup plus rapidement les anomalies, y compris la fraude. Ce type de système en temps réel concerne généralement les factures, mais s'applique aussi à d'autres documents fiscaux. À plus long terme, ils pourraient également rendre superflu le système actuel de déclaration de TVA.

L'introduction à terme d'un système en temps réel en Belgique ne semble pas improbable, compte tenu, notamment, des tendances mondiales dans ce domaine. Cela nécessitera une numérisation de grande envergure, tant de la part du contribuable que de l'administration de la TVA, bien que les autorités fiscales belges aient déjà acquis une certaine expérience dans ce domaine avec, par exemple, la célèbre plateforme Tax-on-Web, déjà utilisée par des millions de contribuables pour remplir leurs déclarations d'impôt sur le revenu des personnes physiques. Toutefois, la mise en œuvre d'un système de déclaration en temps réel dans un avenir proche demeure incertaine. Néanmoins, toute entreprise envisageant aujourd'hui de mettre à jour son système ERP ou d’en acquérir un neuf serait bien à même de se demander si celui-ci sera prêt pour l’avenir. En d'autres termes, ce progiciel sera-t-il capable de faire face aux futurs défis de la déclaration de TVA en temps réel ?

Certes, de nombreux contribuables seront sceptiques quant à la déclaration en temps réel. Mais un tel système apporte également des avantages considérables s'il est correctement mis en œuvre. Par exemple, que se passerait-il si, à la suite de cette déclaration en temps réel, les déclarations mensuelles TVA et les relevés Intrastat étaient supprimés ? Si la relation avec l'administration de la TVA se voyait transformée d’un contrôle/verbalisation à une vraie coopération ? Si la fraude à la TVA était-elle réellement enrayée, les « recettes supplémentaires » générées par l'État étant utilisées pour d'autres incitations fiscales (écologiques) qui profiteraient aux parties de bonne foi ?

Déclaration TVA d'ici 2025

Une refonte complète de la déclaration de TVA ne représente pas la solution ultime pour éviter la perte de recettes et la fraude. Compte tenu des développements mondiaux dans le domaine des systèmes de déclaration en temps réel, une solution de ce type sera également introduite en Belgique dans un avenir proche. Cela rendra la méthode actuelle de déclaration obsolète, mais probablement pas encore avant 2025.

Auteur : Jean-Philippe Roux, Director l’équipe Fiscalité indirecte de KPMG 

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