Si le mécanisme des déductions TVA assure la neutralité du système en permettant à la plupart des entreprises de récupérer la taxe qui leur a été facturée par leurs propres fournisseurs (c’est-à-dire la TVA en amont), il cause également de nombreuses difficultés à ces mêmes entreprises. En effet, la TVA payée sur des achats destinés à une utilisation non professionnelle ou à des fournitures exonérées n'est, en principe, pas déductible. De nos jours, le calcul de la TVA déductible est ainsi devenu dans les faits si complexe pour la plupart des assujettis qu’il représente non seulement une charge de travail supplémentaire réelle pour ceux-ci mais il amène également à une série de discussions sans fin avec l’administration fiscale en cas de contrôle.
La problématique décrite ci-dessus est la même pour la fourniture de services exonérés, sans droit à déduction de la TVA en amont, tels que les services financiers, d'assurance ou médicaux. Par exemple, lorsque l'assujetti est une banque qui fournit des services de crédit (c'est-à-dire des services exonérés) ainsi que des conseils financiers aux particuliers (donc des services taxables), il doit déterminer comment attribuer la TVA payée sur ses achats utilisés à la fois pour ses services exonérés et taxables. Lorsque la banque acquiert un nouvel immeuble de bureaux, elle devra déterminer la proportion de la TVA (encourue en relation avec l'acquisition) qui est déductible aux fins de la TVA. Il est souvent difficile de déterminer cette proportion sur la base de l'utilisation réelle de l'immeuble de bureaux. L'utilisation des proportions de revenus générés par les différents services de la banque, qui, par définition, changent chaque année, permet aussi de calculer cela d’une autre façon.
Comme le montrent les exemples ci-dessus, le calcul de la proportion déductible de la TVA s’avère souvent fastidieux et chronophage, voire irréalisable en pratique. Par ailleurs, la prolifération des règles à laquelle nous assistons depuis des années conduit également à de nombreuses erreurs commises par des assujettis de bonne foi et, par la suite, aux litiges qui en découlent. Parallèlement à cela, étant donné la difficulté, voir l’impossibilité, de contrôler les éléments factuels à la base du calcul du montant de TVA déductible par les assujettis, certains peuvent être tentés de les exagérer à leur avantage. Dans ce contexte, les contrôleurs TVA doivent être particulièrement vigilants quant à la déduction de la TVA payée en amont.
Alors que la Belgique n’en est qu’aux prémices de cette simplification, certains pays sont bien plus avancés dans leur quête de simplification des règles pour le calcul du montant de TVA déductible. Par exemple, la république de Singapour impose dorénavant aux institutions bancaires (c’est-à-dire aux assujettis qui fournissent des services financiers exonérés ainsi que des services taxables) un pourcentage fixe et obligatoire de déduction. De telles simplifications n’existent actuellement pas dans la législation de l’Union européenne, mais la Commission européenne a commandé une étude en 2019 sur le traitement TVA des services financiers qui, éventuellement, aboutira à un réexamen dans les années à venir des règles de déduction de la TVA.
Au vu de ce qui précède, nous sommes enclins à de nouvelles approches qui simplifient les règles relatives à la déduction de la TVA. Et vous ? Si vous dirigez une entreprise, une telle simplification pourrait réduire votre charge administrative. Toutefois, y seriez-vous favorable si vous n’étiez pas en mesure de soustraire toute la TVA en amont déductible sur la base des règles actuelles plus complexes ? Et, lorsque cette part non déductible de la TVA est intégrée en tant que coût dans le prix des biens et services, et, par conséquent, entraîne une augmentation des prix d'achat, seriez-vous du même avis si vous étiez un client ?
Auteur : Sebastian Kirsch, Director l’équipe Fiscalité indirecte de KPMG
La question de la déductibilité de la TVA
Prenons le cas de figure classique d’un assujetti ordinaire qui achète un smartphone destiné tant à son activité économique qu’à un usage privé (donc, à un usage mixte). Cet assujetti déduit uniquement la part de la TVA grevant l’achat du téléphone réservé à l’usage professionnel. Il est donc nécessaire d'établir la proportion entre utilisation privée et professionnelle de l’accessoire sur la base de circonstances factuelles. En théorie, ce ratio pourrait, par exemple, être déterminé en fonction du nombre de minutes passées au téléphone à des fins privées ou professionnelles. Cependant, force est de constater qu’en pratique un tel exercice n’est pas réaliste au regard des moyens humains et économiques qu’il mobiliserait.La problématique décrite ci-dessus est la même pour la fourniture de services exonérés, sans droit à déduction de la TVA en amont, tels que les services financiers, d'assurance ou médicaux. Par exemple, lorsque l'assujetti est une banque qui fournit des services de crédit (c'est-à-dire des services exonérés) ainsi que des conseils financiers aux particuliers (donc des services taxables), il doit déterminer comment attribuer la TVA payée sur ses achats utilisés à la fois pour ses services exonérés et taxables. Lorsque la banque acquiert un nouvel immeuble de bureaux, elle devra déterminer la proportion de la TVA (encourue en relation avec l'acquisition) qui est déductible aux fins de la TVA. Il est souvent difficile de déterminer cette proportion sur la base de l'utilisation réelle de l'immeuble de bureaux. L'utilisation des proportions de revenus générés par les différents services de la banque, qui, par définition, changent chaque année, permet aussi de calculer cela d’une autre façon.
Comme le montrent les exemples ci-dessus, le calcul de la proportion déductible de la TVA s’avère souvent fastidieux et chronophage, voire irréalisable en pratique. Par ailleurs, la prolifération des règles à laquelle nous assistons depuis des années conduit également à de nombreuses erreurs commises par des assujettis de bonne foi et, par la suite, aux litiges qui en découlent. Parallèlement à cela, étant donné la difficulté, voir l’impossibilité, de contrôler les éléments factuels à la base du calcul du montant de TVA déductible par les assujettis, certains peuvent être tentés de les exagérer à leur avantage. Dans ce contexte, les contrôleurs TVA doivent être particulièrement vigilants quant à la déduction de la TVA payée en amont.
Simplification des règles relatives à la déduction de la TVA
Pour toutes ces raisons, l’administration fiscale belge a entamé le chantier d’une simplification des règles relatives à la déduction de la TVA en mettant en place une série de forfaits qui correspondent approximativement à la proportion d’utilisation professionnelle de certains biens à usage mixte (les voitures de sociétés, smartphones, ordinateurs…) et des services qui y sont liés (les abonnements de téléphone, frais de réparation…). Bien que l'application de ces taux forfaitaires soit facultative, la plupart des assujettis les reprennent pour de bonnes raisons. En effet, ces forfaits permettent de réduire les moyens humains et économiques nécessaires au calcul du montant de TVA déductible. Ils offrent également et surtout aux assujettis l’assurance de ne pas voir leur déclaration contestée par un contrôleur qui discuterait des éléments factuels utilisés pour établir le montant de TVA déductible ou qui découvrirait des erreurs commises de bonne foi et commises en raison de la complexité du calcul ou de la législation TVA.Alors que la Belgique n’en est qu’aux prémices de cette simplification, certains pays sont bien plus avancés dans leur quête de simplification des règles pour le calcul du montant de TVA déductible. Par exemple, la république de Singapour impose dorénavant aux institutions bancaires (c’est-à-dire aux assujettis qui fournissent des services financiers exonérés ainsi que des services taxables) un pourcentage fixe et obligatoire de déduction. De telles simplifications n’existent actuellement pas dans la législation de l’Union européenne, mais la Commission européenne a commandé une étude en 2019 sur le traitement TVA des services financiers qui, éventuellement, aboutira à un réexamen dans les années à venir des règles de déduction de la TVA.
Au vu de ce qui précède, nous sommes enclins à de nouvelles approches qui simplifient les règles relatives à la déduction de la TVA. Et vous ? Si vous dirigez une entreprise, une telle simplification pourrait réduire votre charge administrative. Toutefois, y seriez-vous favorable si vous n’étiez pas en mesure de soustraire toute la TVA en amont déductible sur la base des règles actuelles plus complexes ? Et, lorsque cette part non déductible de la TVA est intégrée en tant que coût dans le prix des biens et services, et, par conséquent, entraîne une augmentation des prix d'achat, seriez-vous du même avis si vous étiez un client ?
Déductibilité de la TVA d'ici 2025
L’Union européenne et l’administration fiscale belge ne devraient-elles pas prendre exemple sur certaines simplifications ayant fait leurs preuves ailleurs dans le monde ? En effet, alors que les effectifs de l’administration fiscale belge s’amenuisent d’année en année et que les tribunaux nationaux et européens sont engorgés par des dossiers résultant notamment de la complexité de notre système TVA, il semble nécessaire de simplifier autant que faire ce peu ces règles, afin de réduire les risques d’erreurs et de fraude, et de prévenir d’éventuels litiges. Finalement, bien que cette simplification puisse aller à l’encontre du principe de neutralité de la TVA, ne serait-il pas avantageux, tant pour l’administration que pour les assujettis, de créer de nouveaux forfaits, voire même de refuser la déduction de la TVA grevant certaines catégories de biens qui requièrent une quantité de ressources trop importante pour leur calcul et leur contrôle ? Gageons que cela soit le cas dans un avenir proche, et pourquoi pas d’ici 2025.Auteur : Sebastian Kirsch, Director l’équipe Fiscalité indirecte de KPMG