Jean Marot est avocat depuis 2004. Passionné par la transformation digitale, il a notamment été récompensé par les prix de l’innovation du barreau de Liège-Huy et d’Avocats.be. Il a fondé en 2018 la legaltech legalstreet.be, plateforme consacrée essentiellement à l’indemnisation des dommages corporels.
Quelles sont vos observations générales quant à l'impact de la pandémie sur les professionnels du droit aujourd'hui, et quelles pourraient être, à votre avis, les principales futures conséquences ?
L’impact, c’est avant tout la prise de conscience. Les acteurs du monde juridique avaient conscience que le train de la transformation digitale était en marche. À la suite de la pandémie, ils se sont rendus à l’évidence : ce train n’attend pas et il faut y monter tant qu’il est encore temps. Pour rester dans la métaphore, le frein de la résistance au changement a été desserré et on ne peut que s’en réjouir. Le fonctionnement de la justice a été particulièrement bousculé et a connu une accélération fulgurante. On a rattrapé une partie du retard, mais le chantier reste colossal. Je crains un certain relâchement. Les M.A.R.C. vont à mon sens connaître un véritable essor. Les plateformes de résolution de litige (en mode SaaS) sont vouées à se multiplier, en particulier la médiation et l’arbitrage en ligne à qui je prédis un beau succès.
Pour le futur, je pense également à la génération qui va arriver sur le marché du travail. En septembre 2021, un diplômé en droit aura vécu presque toute la durée de son master à la maison. Ces jeunes juristes, qui sont nés avec un smartphone en main, vont intégrer les cabinets d’avocats avec d’autres attentes et un mindset radicalement différent. Il faut y voir une belle opportunité de réussir sa transformation digitale de l’intérieur.
Quels changements apportés ou initiés pendant la pandémie resteront (par exemple, une plus grande adoption de la technologie, le travail à domicile, la collaboration virtuelle avec les clients, des audiences virtuelles, etc.) ?
Au plus fort du confinement, certains se sont rendu compte que leur marché ne s’arrête pas aux portes de leur ville, de leur barreau. En l’absence de déplacements, il n’y avait plus de barrières géographiques, plus de petits ou de grands cabinets, juste des juristes et des avocats derrière leur écran. Aujourd’hui, il faut avoir conscience que nous avons tous potentiellement accès à un marché mondial sans limites.
La pandémie a également contribué à souligner l’importance de l’expérience client (user centric). Beaucoup ont fait la démarche de mieux identifier les besoins de leurs clients de manière notamment à définir de nouvelles offres de services, et il s’agit d’une opportunité. Cette tendance va se poursuivre avec l'adoption de logiciels juridiques ainsi, car il va falloir être en mesure de répondre aux exigences croissantes des consommateurs de services juridiques. Enfin, les nouvelles manières de travailler (NWoW) vont certainement s’installer durablement. Il est évident que la tendance au homeworking est irréversible, mais j’épingle également l’organisation des espaces de travail dans le but de faciliter le travail collaboratif ainsi que l’aménagement du temps de travail avec une recherche d’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée.
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